La GMT-Master est une pièce iconique de Rolex. Son design n’a que peu évolué depuis sa création, et a depuis largement influencé le monde horloger. Une histoire passionnante, qui débute au milieu des années 50 dans les cockpits de la PanAm, pour finir dans les salles d’enchères les plus réputées pour les références le plus rares. Retour sur plus de 67 ans de carrière de la Rolex GMT-Master.

La genèse de la GMT-Master : d’abord une montre de pilote

Bien qu’elle ne reprenne pas les codes esthétiques traditionnels des montres d’aviateurs, façon « flieger », la Rolex GMT-Master est bel et bien une montre de pilote d’avion. Sa carrière débute dans les années 50. À cette époque, l’aviation civile est en plein essor, et les vols transcontinentaux se démocratisent. Parmi les compagnies les plus réputées, il y a la Pan American World Airways. La PanAm, comme on dit, commande alors à Rolex des montres pour permettre à ses pilotes de suivre deux fuseaux horaires lors de leurs vols transcontinentaux. Initialement, ce 2ème fuseau horaire devait être le GMT : Greenwich Mean Time, qui est la référence dans le monde aéronautique, pour tous les documents et les communications. D’où le nom GMT de la montre et de sa 4ème aiguille. Mais les pilotes ont rapidement pris l’habitude de se servir de cette fonctionnalité pour suivre le fuseau horaire de leur domicile. Une façon de se faire adopter également par tous les grands voyageurs. Pour plus de détails au sujet de la fonction GMT, consultez notre article ici.

GMT-Master 6542 [1955-1959] : la première de la lignée

La toute première GMT-Master est produite en 1954, mais sort officiellement en 1955. Elle porte la référence 6542. C’est avec ce modèle que Rolex répond à la commande de la PanAm. Pour cela, la marque à la couronne s’appuie sur un modèle déjà existant : la Turn-O-Graph, ref 6202. Il s’agit de la première Rolex produite en série à utiliser une lunette rotative. Exactement ce dont avait besoin Rolex pour sa fonction GMT. Rolex remplace la lunette graduée par une lunette 24h, et ajoute la fameuse 4ème aiguille qui tourne en 24 heures… et le tour est joué ! La 6542 porte en elle l’ADN de toutes les GMT-Master qui suivront. La fameuse lunette est bicolore rouge/bleu, pour différencier les périodes de jour et de nuit. Elle est rapidement surnommée « pepsi », en référence à la marque de soda utilisant les mêmes couleurs. Son insert est fabriqué en bakélite jusqu’en 1956, puis en aluminium pour plus de solidité. La 4ème aiguille, quant à elle, est rouge vif et se termine par une flèche pointant sur la lunette. Le guichet dateur, placé à 3h, est surmonté par une loupe, le fameux « cyclope ». L’aiguille des heures est typique de Rolex, avec sa forme dite « Mercedes », tandis que les index sont eux aussi classiques, identiques à ceux de la Submariner, sortie 2 ans plus tôt. Le boîtier mesure 38mm de diamètre, ce qui en fait une montre assez grosse pour l’époque. Enfin, il faut noter l’absence de protège-couronne, un des rares éléments de design qui évoluera au cours des années. La GMT-Master 6542 est animée par les calibres 1036, 1065 puis 1066 selon les années. Il ne s’agit pas de mouvements GMT à proprement parler, à savoir que la 4ème aiguille ne peut pas être réglée indépendamment. Pour l’anecdote, cette référence est surnommée « Pussy Galore », du nom de la James Bond girl qui la portait dans le film Goldfinger (1964).

GMT-Master 1675 [1959-1980] : l’iconique

En 1959, Rolex dévoile la GMT-Master référence 1675. Un best-seller, adulé par les fans de la marque, qui connaîtra une longue carrière : plus de 20 ans de production. Par rapport à la 6542, la 1675 est plus musclée. L’aspect tool-watch est plus présent. Le boîtier passe de 38 à 40mm de diamètre. La couronne est désormais flanquée par deux protège-couronnes. Esthétiquement, cette 1675 est celle qui pose véritablement les bases de toutes les GMT-Master modernes. Depuis, le dessin n’a que peu évolué. La 1675 connaît deux mouvements : le calibre 1565 (1959-1965) et le calibre 1575 (1965-1980). Deux références se distinguent particulièrement : la « long E », dont les 3 branches du « E » de « Rolex » sont de la même longueur, et la « Blueberry », reconnaissable à sa lunette entièrement bleue. La 1675 est proposée sur bracelet Oyster ou Jubilée.

GMT-Master 16750 [1981-1988] : à l’heure des années 80

Sortie en 1981, la référence 16750 est une évolution de la 1675. Les changements les plus notables se font au niveau du mouvement. La 16750 embarque le calibre nouvelle génération 3075, qui offre le réglage rapide de la date, dit « quick set date », et une cadence à 4Hz, soit 28’800 alternances par heure, le standard aujourd’hui encore. C’est également la première GMT-Master à être étanche jusqu’à 100m, les versions précédentes n’étant étanches qu’à 50m. L’une des versions les plus convoitées est sans doute la référence 16753 dite « root-beer » : un modèle bi-ton, acier et or jaune, avec un cadran marron. Elle tient son surnom de la boisson éponyme, un soda vendu en Amérique du Nord. Côté cinéma, elle fut repérée au poignet de Clint Eastwood dans le film Ligne de Mire (1993).

GMT-Master 16700 [1988-1999] : la dernière « classique »

En 1988, alors que la nouvelle génération baptisée GMT-Master II est déjà sortie (voir plus bas), Rolex donne un dernier coup de neuf à la GMT-Master classique. Il s’agit de la référence 16700. Elle est équipée du calibre 3175, qui n’offre toujours pas de 4ème aiguille indépendante, pour rester fidèle à l’esprit de la 6542 des années 50. C’est la référence qui signe la fin de carrière de la GMT-Master classique, remplacée par la GMT-Master II.

GMT-Master II 16760 [1983-1988] : première « vraie » GMT

En 1983, Rolex dévoile la première GMT-Master nouvelle génération : la GMT-Master II. Ce modèle porte la référence 16760, et est surnommé « fat lady », en raison de son embonpoint, ou « Sophia Loren », ce qui est beaucoup plus flatteur. Il marque un tournant dans la carrière des GMT-Master. En effet, grâce à son calibre 3085, c’est la première GMT-Master à posséder une 4ème aiguille vraiment indépendante. Une « vraie » GMT, pour les puristes. De plus, elle inaugure un verre saphir, remplaçant les verres acryliques utilisés jusque-là, ainsi que la lunette « coke » rouge et noire, en référence aux couleurs de la célèbre marque de soda.

GMT-Master II 16710 [1989-2007] : passage à l’ère moderne

La référence 16710 débute sa carrière en 1989. Et en 18 ans de production, elle subit de nombreuses évolutions. La matière photo-luminescente passe du tritium au Luminova puis au SuperLuminova, les « end links » (dernier maillon du bracelet, au niveau du boîtier) sont pleins et non plus évidés, et les anses ne sont plus trouées. La 16710 est animée par les calibres 3185 puis 3186, ce dernier utilisant le nouveau ressort-spiral Parachrom.

GMT-Master II 116710 [2005-2018] : 50 ans de carrière

À l’occasion des 50 ans du modèle, Rolex dévoile une nouvelle version de sa GMT-Master II. Portant la référence 116710, ce modèle introduit plusieurs nouveautés esthétiques, au gré des différentes déclinaisons : boîtier légèrement redessiné, rehaut gravé Rolex, loupe cyclope traitée anti-reflets, maillon central du bracelet poli, lunette céramique, cadran « maxi dial »… Dans la nomenclature de Rolex, les différentes couleurs de lunette sont désignées ainsi : LN pour « lunette noire » et BLNR pour « BLeu NoiR ». La référence 116710 et ses déclinaisons sont animées par le calibre 3186.

GMT-Master II 126710 [2018-aujourd’hui] : retour de la pepsi acier

La GMT-Master II ref 126710 est dévoilée en 2018. Elle marque le retour tant attendu de la lunette « pepsi », codée BLRO pour « BLeu ROuge », sur boîtier acier. En effet, cette configuration, très prisée des amateurs en raison de son héritage direct des années 50, n’était disponible depuis longtemps que sur les modèles en or. De plus, la 126710 est animée par un nouveau mouvement : le calibre 3285. Celui-ci embarque avec lui toutes les dernières innovations de la marque. Il dispose d’une réserve de marche très généreuse de 70 heures, et affiche une précision exceptionnelle de -2/+2 secondes par jour. De plus, il est garanti 5 ans.

La collection actuelle des GMT-Master II

En ce début d’année 2022, voici à quoi ressemble le catalogue Rolex, au chapitre des GMT-Master II. Quatre modèles en acier : lunette pepsi sur bracelet Oyster ou Jubilée et lunette BLNR sur bracelet oyster ou Jubilée (surnommées respectivement « Batman » et « Batgirl »). Un modèle bi-ton, acier et or rose. Deux modèles or gris, lunette pepsi, cadran bleu ou cadran météorite. Et enfin, un modèle en or rose.

De montre de pilote à montre cosmopolite

La GMT-Master est à l’origine une montre de pilote. Mais elle est rapidement devenue la montre cosmopolite par excellence, plébiscitée par les grands voyageurs qui jonglent avec plusieurs fuseaux horaires. Tout au long de sa carrière, elle a connu de nombreuses références. Vintage ou modernes, des plus discrètes en acier et lunette noire aux plus clinquantes en or jaune, en passant par les configurations les plus rares, il y en a pour tous les goûts. Mais durant ses 67 ans de production, Rolex ne l’a faite évoluer que par petites touches, restant fidèle au design original. Une philosophie typique de la marque à la couronne qui permet aux collections GMT-Master I et II de rester cohérentes et de conserver une identité très forte. Malheureusement, acquérir aujourd’hui une GMT-Master I ou II relève du défi, ou nécessite des finances très solides : comme souvent chez Rolex, les modèles neufs sont très compliqués à avoir en boutique et les prix sur le marché secondaire ont explosé. Mais pour les heureux propriétaires, la GMT-Master reste un modèle emblématique, au design iconique, et qui n’a cessé de s’améliorer avec le temps. Un condensé de Rolex, en somme.

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