ETA, 3 lettres que les amateurs d’horlogerie connaissent bien et pour cause : cette société est la plus grande productrice de mouvements suisses au monde. Aujourd’hui partie intégrante du Swatch Group, son histoire est étroitement liée à celle de l’industrie horlogère suisse. Lumière sur l’histoire de cette manufacture incontournable.
Un besoin de régulation
Avant même de parler d’ETA, il est essentiel de vous raconter les événements qui ont conduit à sa création. Pour cela, nous allons nous projeter aux débuts des années 1920. À cette époque, les cycles de crises et de périodes fastes se succèdent. Chaque crise mettant au chômage bon nombre d’horlogers, chacun se devait d’écouler sa production, souvent en cassant les prix, mais aussi en se livrant au chablonnage. Une pratique consistant à vendre des chablons à l’étranger c’est à dire des mouvements en pièces détachées, permettant ainsi de contourner l’interdiction de vente de mouvements finis hors des frontières suisses et constituant une concurrence déloyale pour les manufactures produisant des montres complètes. La Fédération Suisse des Associations de Fabricants d’Horlogerie créée en 1924 va ainsi tenter de mettre de l’ordre dans cette industrie.
La création d’Ebauches SA
Le tissu industriel horloger était assez disparate avec d’un côté les fabricants d’ébauches, des mouvements sans leurs organes régulateurs, soit de grandes usines employant des centaines de personnes. Et de l’autre les fabricants d’ancres, de spiraux et de balanciers, soit des entreprises de taille bien plus modeste. Pour ces derniers sera créé l’Union des Branches Annexes de l’Horlogerie en 1927 afin de garantir des prix stables. C’est sous l’impulsion des banques que naîtra Ebauches SA le 27 décembre 1926, fruit du regroupement de 3 des plus gros fabricants d’ébauches, représentant plus des ¾ de la production suisse. En l’espace de 3 ans, ce seront pas moins de 27 autres fabricants d’ébauches qui seront absorbés. Mais il restera encore assez de « dissidents » pour ne pas arriver à empêcher le chablonnage malgré une convention signée entre les membres d’Ebauches SA, qui sera dénoncée en 1930 sur fond d’une nouvelle crise du secteur.
Passage à la vitesse supérieure avec l’ASUAG
La stratégie de concentration était bonne mais pas assez totale pour aboutir. C’est donc dans un contexte difficile de faillites et de chômage que les banques ainsi que les associations horlogères vont obtenir de la Confédération Suisse un engagement financier substantiel sous forme de capitaux et crédits sans intérêts afin de permettre de relancer le processus de regroupement. Ceci va aboutir à la création, le 14 août 1931, de la Société Générale de l’Horlogerie Suisse SA ou l’ASUAG de par ses initiales alémaniques. Cette super holding va permettre d’unir les fabricants de composants annexes en 3 entités distinctes (assortiments, spiraux et balanciers) puis d’en prendre le contrôle. Ebauches SA fera aussi partie du groupe. Les acquisitions de fabriques d’ébauches vont alors s’enchaîner. La Suisse ira même jusqu’à légiférer en 1934 pour interdire le chablonnage en dehors des conventions, s’assurant ainsi que les 22 entreprises ayant échappé au giron de l’ASUAG ne puissent inonder les marchés étrangers de leurs produits.
Et la manufacture ETA dans tout ça ?
C’est en 1856 que Joseph Girard et Urs Schild créent une fabrique d’ébauches à Granges. L’entreprise prospère et se mue en manufacture en 1880 de par la production d’une montre entièrement réalisée en interne. La marque deviendra Eterna en 1906, quelques années après l’apparition du nom sur les cadrans. En 1932, ETA est créé par le fruit de la scission d’Eterna en 2 entités lors de son intégration par l’ASUAG. Eterna SA qui fabriquera des montres finies, tandis qu’ETA SA s’attardera aux ébauches de mouvements. L’entreprise produit des mouvements de qualité, puis dans les années 50 c’est une des rares à être autorisées par l’ASUAG/Ebauches SA à produire des mouvements automatiques, probablement grâce à son expérience sous l’ère Eterna.
La crise du quartz
Au sortir de la guerre, le secteur sera en croissance continue jusqu’aux années 70. Pour ainsi dire, tout ira bien pour le groupe qui continuera ses rachats et ses regroupements, plaçant les plus petites sociétés sous l’égide des plus grandes pour en assurer stabilité et solidité financière, mais aussi pour réduire la concurrence et mutualiser les développements. Mais la crise dite du « quartz » dans les années 70 obligera encore à restructurer cette industrie. À la fin de la décennie, ETA fusionnera avec A. Schild SA, l’une des 3 sociétés du début d’Ebauches SA, en faisant le plus grand fabricant d’ébauches au monde. Puis d’autres rejoindrons ETA comme la Fabrique d’Horlogerie de Fontainemelon qui a vu le jour en 1793, plus vieille manufacture d’ébauches au monde. Et ce, jusqu’en 1983, année de la dissolution d’Ebauches SA et de la fusion de l’ASUAG avec la Société Suisse pour l’Industrie Horlogére (SSIH) née en 1930 du regroupement entre Omega et Tissot. En cette année, la grande majorité des sociétés restantes rejoindront ETA, dont les noms évocateurs que sont Unitas, Peseux et Valjoux entre autres.
Le développement de la Swatch
Dès 1979, ETA sera la première fabrique européenne de mouvements à quartz. Pour contrer l’offensive étrangère, essentiellement japonaise, sur le créneau des montres à quartz, il sera confié à ETA le développement d’une montre suisse bon marché : la Swatch. La maîtrise industrielle d’ETA fera de cette montre un succès mondial, permettant de constituer une base solide pour le reste du groupe qui deviendra la Société de Microélectronique et d’Horlogerie (SMH) en 1985, puis le Swatch Group en 1998. C’est « la » montre qui va relancer l’horlogerie suisse qui avait perdu plus des 2/3 de sa production en comparaison avec le début des années 70.
La production d’ETA aujourd’hui
Les produits ETA son réputés fiables et robustes, comme le calibre ETA 2824-2 surnommé le tracteur de l’horlogerie qui équipe bon nombre de montres suisses. Mais aussi le Valjoux 7750, la référence des chronographes automatiques suisses, l’Unitas 6497 aussi très utilisé dans les montres à remontage manuel, l’ETA 2892, cousin du 2824 mais plus compact… L’offre est vaste et ETA sait produire à bas coûts, comme le mouvement Sistem51 de Swatch, dont la fabrication est entièrement automatisée et qui ne comporte que 51 pièces. Même chose pour les mouvements bien plus haut de gamme comme le calibre 8500 d’Omega. Le Swatch Group et ETA ont obtenu de la ComCo (commission de la concurrence) d’être libérés de leurs obligations de livraison à la concurrence à partir de 2020, la transition s’effectuant progressivement depuis 2014, réservant ainsi la majorité de sa production aux marques du groupe. Ce qui explique notamment l’essor de motoristes tels que Sellita, Soprod ou STP.
août 8, 2018
Très bonne rétrospective !
août 8, 2018
Très instructif. Merci.
août 9, 2018
Trés bon article, une moyenne de 100 € vu d’avion pour la fabrication d’un 2824-2 de base.
Cela vous ouvre les yeux sur les marges des prémiums ‘ Swiss made’ qui proposent cette base légèrement adaptée à plusieurs K€. C’est pas un secret, mais au moment de craquer et de sortir sa carte bleu, il faut mieux le faire en connaissance de cause. Vous (nous ) payez le nom et pas le contenu.
Ceci dit, de très bon produits ces ETA.
août 10, 2018
Hello,
Quand on sait que Swatch Group detient un nombre consequent de marques et notamment un grand nombre de luxes. Quand on sait que la plupart emboitent des mouvements ETA de tres bonne qualité après j’espere juste que les marques premiums emboitent des mouvements avec les niveaux de qualities les plus eleve pour justifie d’un prix eleve. J’espere egalement qu’elles n’utilise pas les mouvements de finition entrée de gamme ou de moyenne gamme. Mais il est vrai que de payer dans les 4000€ certaines montres en sachant que c’est un ETA á l’interieur cela peut fair un peu mal. Mais bon c’est comme ca. Mais l’article est tres interessant et tres instructif cela me permet d’en apprendre un peu plus sur l’histoire de l’horlogerie.
septembre 14, 2018
Je porte tous les jours un montre Tissot seastar à quartz équipée d un mouvement ETA qui a plus de 20 ans et qui fonctionne à merveille bravo pour la fiabilité de ces Quartz
septembre 26, 2018
Le mouvement ne représente qu’une partie de la montre, la corrélation mouvement/prix final est loin d’être une évidence !!
novembre 27, 2020
Bonjour
Le problème dans cet historique c’est que l’on parle très très peu des montres de marque ETA ! !
J’ai dit les montres ETA avec mouvement ETA 2824….Pourquoi.?.
Mystère!!!!
pas de photos….rien ! !
J’en ai une en parfait état et je suis sans la moindre info ! !
Cordialement
Christian