C’est un standard d’excellence que l’on retrouve sur certaines pièces de haute horlogerie. Créée en 1886 pour protéger l’horlogerie genevoise, cette marque distinctive portant les armoiries de la ville est apposée sur les mouvements répondant à un cahier des charges très strict et portant autant sur la précision que sur la finition par un organisme officiel de l’École d’horlogerie de Genève. Lumière sur le célèbre Poinçon de Genève.

La contrefaçon, déclencheur de la naissance d’une certification

L’aigle noir, symbole de ville impériale, et les clés appartenant à Saint-Pierre permettant d’ouvrir le Royaume des Cieux. Voici ce que vous pouvez retrouver sur les armoiries de la ville de Genève. Ces symboles chers à la ville ont été repris dans le poinçon de Genève fêtant en cette année ses 132 ans et venant récompenser l’excellence des horlogers. L’histoire raconte que des artisans horlogers protestants, venant se réfugier à Genève à la suite d’une réforme, ont réussi à relancer l’activité économique en se réunissant sous le couvert d’une corporation horlogère. Dès le XVIIe siècle, l’industrie horlogère devient un domaine prospère et la ville de Genève en devient un véritable bastion. Afin de se protéger déjà à l’époque des contrefacteurs, les fabricants inscrivaient le terme « Genève » sur les mouvements qui donnaient vie à leurs créations. Mais comme dans tous les domaines du commerce, des personnes malintentionnées ont utilisé l’apposition pour commercialiser des montres provenant d’autres contrées.

L’avènement du Poinçon de Genève

Dès le milieu du XIXe siècle, deux hommes nommés Kohler et Moré émettent un livre blanc dans lequel ils songent à créer une certification se rapprochant fortement de celle qui sera adoptée en 1886. Toutefois, cet essai relatif à la certification attire les critiques auxquels Kohler répondra dans un article au sein du Journal de Genève. En partenariat avec la Société des Horlogers de Genève et les fabricants de montres, une piste est envisagée pour contrôler et identifier la provenance des montres. Mais il faudra attendre 1886 pour que le Grand Conseil, à la suite de trois débats vindicatifs, adopte une loi sous l’appellation « Contrôle falcutatif des montres de Genève ». Cette vérification sera effectuée par le « Bureau de contrôle des montres genevoises » qui apposera le poinçon d’état sur les montres fabriquées et réglées à Genève, si ces dernières remplissent des critères stricts.

Les évolutions des règles à la suite des progrès techniques

La loi a été révisée plusieurs fois afin d’être en adéquation avec les techniques et les matériaux évoluant avec le temps. Mise à jour en 1891, 1931, 1955 et 2012, les montres devaient répondre à 12 critères pour être estampillées du poinçon représentant les armoiries de Genève. Ces différents critères étant liés aux exigences techniques comme le fait de présenter un mouvement pourvu de pierres en rubis avec des trous polis au rouage et à l’échappement, ainsi qu’à l’esthétique comme des ponts aux angles polis et aux flancs étirés. Ce poinçonnage est le gage d’excellence et de fiabilité en plus d’être l’emblème d’une tradition horlogère vieille de plus de 500 ans. Il garantissait la provenance mais aussi l’assemblage, le réglage et le contrôle des mouvements provenant de « la plus petite des grandes capitales ». Les organismes qui président la distribution de ce Graal genevois sont le « Timelab », soit le laboratoire d’horlogerie et de microtechnique de Genève, ainsi que la Commission Technique du Poinçon de Genève.

Une certification controversée au sein des maisons horlogères

De nombreux mouvements sont frappés par l’emblème de Genève depuis plus d’un siècle. Toutefois, deux géants de l’industrie horlogère ne se réfèrent pas à ce label. En effet, Rolex d’une part n’utilise pas ce référentiel horloger ni aucun autre standard horloger par la même occasion. De par son histoire, la marque à la couronne n’a jamais souhaité être rattachée à ces critères de standardisation et ces référentiels de qualité à l’exception de la qualification COSC. L’autre grande manufacture n’étant pas certifiée par les armoiries de Genève est Patek Philippe qui a pourtant profité de cette appellation d’excellence durant longtemps, mais qui a décidé de créer son propre poinçon en 2009.

Même s’il existe des manufactures qui ne possèdent pas l’aigle impériale ni les clés de Saint Pierre sur leurs mouvements, il existe des maisons qui font estampiller l’ensemble de leurs montres par le poinçon comme Roger Dubuis. Cette firme de 23 ans s’affiche comme « l’unique manufacture 100 % certifiée Poinçon de Genève ». La maison qui fabrique 4500 montres par an est connue pour ses garde-temps aux complications d’exception qui s’affichent dans des mouvements squelettés. Elle est fière d’être la seule à proposer la certification pour l’ensemble de sa gamme et même si cela représente beaucoup de temps supplémentaire à passer sur chaque montre. Ensuite, des marques telles que Cartier, Chopard, Vacheron Constantin ou Louis Vuitton y font appel régulièrement

Au final, cette certification d’exception est certes un gage d’une qualité de finition formidable, mais le manque de souplesse concernant la zone géographique lui fait aussi défaut. Aujourd’hui, on peut voir de nombreuses maisons qui font confiance à d’autres établissements certifiant la qualité des mouvements comme la Fondation Qualité Fleurier, le COSC ou encore un organisme français, l’Observatoire de Besançon. De nombreuses maisons horlogères n’ayant pas leur site de production à Genève, elles ne peuvent avoir recours à l’estampille des armoiries de la ville sur leurs mouvements et utilisent donc d’autres commissions permettant de certifier la qualité de leurs mouvements.