Niché au cœur de la ville paisible de Higashine, dans la préfecture de Yamagata, le site de Yamagata Casio représente un pilier fondamental de la marque G-SHOCK. Fondé en 1979, cette usine est dédiée à la création des montres MR-G, qui incarnent le sommet de la robustesse et du design dans l’univers de la « Gravitational Shock » (pour ceux qui ne connaissaient pas encore la signification du nom de la marque). Ce cadre exceptionnellement pur, sous la protection du mont Gassan, est un véritable havre de paix pour l’artisanat de précision requis par cette « haute horlogerie » façon G-SHOCK.

G-SHOCK : une révolution en horlogerie

L’histoire de G-SHOCK remonte à 1983 et s’est fondée sur le rêve de l’ingénieur Kikuo Ibe de créer une montre indestructible. Une idée née de l’amertume d’avoir détruit par mégarde la sienne, offerte par son père. Après des centaines de prototypes (partis en chute libre depuis le troisième étage de la tour Casio à Tokyo) et deux années de recherche avec l’aide de Yuichi Masuda (désormais CEO de Casio), la première montre G-SHOCK est née. Pour y arriver, l’histoire raconte que c’est en observant des enfants jouer avec un ballon dans un parc que la solution lui est apparue : aucun des impacts n’atteignait l’intérieur du ballon. Et c’est en créant une structure creuse dans lequel le module flotterait que la fondation était posée. Ce tout premier modèle, nommé DW-5000C, était capable – comme le voulait Kikuo Ibe – de résister à 10 mètres de chute et 10 bars de pression d’eau avec une batterie durant 10 ans, soit le fameux « Triple 10 ». Une réponse parfaitement adaptée aux ouvriers du bâtiment, mais aussi aux troupes militaires ainsi qu’aux sportifs de l’extrême. En a rapidement résulté une marque aussi technique que branchée, révolutionnant les standards de durabilité dans l’horlogerie, avec un premier engouement apparu sur le continent américain avant de se populariser au Japon par la suite.

Les débuts de la ligne MR-G

Avec de telles bases, il était évident – surtout pour une entreprise japonaise adepte de la méthode Kaizen (amélioration continue des procédés industriels qui a haussé le Japon au rang de superpuissance) – de passer à la vitesse supérieure. Notamment dans une industrie reposant sur des principes vieillissants où produire des garde-temps à la fois luxueux et extrêmement résistants ne trottait dans la tête de personne. C’est comme ça qu’est née la série MR-G, mais avec des débuts difficiles. Car créer une montre en métal incassable relevait presque de l’impossible. Contrairement à la première G-SHOCK, Kikuo Ibe était désormais armé d’une équipe enthousiaste et inspirée. En s’inspirant des pare-chocs de voitures, ils ont séparé la lunette du reste du boîtier car c’était l’élément le plus propice aux chocs, en y insérant un dispositif pouvant amortir les impacts. Sans compter que faire tomber un boîtier de valeur près de 6,000 fois pour tester sa résistance relevait presque de l’absurde ! La première montre du genre a donc vu le jour en 1996 sous le nom de code MRG-100 : pas de résine, ni de couronne et un tarif 5 fois plus élevé que le reste du catalogue. Pour autant, la montre s’est plutôt bien vendue, confortant G-SHOCK dans l’idée qu’ils tenaient quelque chose de palpitant.

En comparaison avec les autres montres de la maison nippone, cette gamme ayant évolué au fil de l’eau s’est forgée une réputation auprès des aficionados de la marque par l’utilisation de matériaux premium puis des techniques de fabrication avancées, ainsi que des finitions d’un grade largement supérieur comme le polissage à la Sallaz. Un procédé qui nécessite des années de pratique afin d’être exécuté sur un nombre de surfaces largement supérieur à une boîte traditionnelle, pour un rendu parfaitement lisse et sans distorsion contrairement au polissage traditionnel qui crée des arêtes arrondies. En résultent des montres combinant fonctionnalité de haute performance et design poussé, les rendant idéales pour ceux recherchant à la fois style et résistance dans des conditions extrêmes…tout comme au quotidien ! Le travail des maîtres artisans sur la série MR-G, réalisé à l’oeil et au toucher, illustre l’engagement continu de Casio envers la perfection, tout en intégrant les technologies les plus avancées pour offrir des montres qui ne compromettent ni leur esthétique ni leur fonctionnalité.

Entre tradition et innovation

Dès ses débuts, l’usine mère s’est distinguée par son approche résolument novatrice de la fabrication de ses montres. En intégrant des technologies de pointe à des techniques artisanales rigoureuses, l’usine a su relever les défis les plus ardus, donnant naissance à des montres d’une qualité exceptionnelle, dignes – et nous assumons ce propos – des plus grandes maisons helvétiques (hormis la mécanique pure). Au cœur de l’usine Yamagata Casio réside une équipe de maîtres artisans hors pairs, les « Médaillistes » (Meister en anglais). Ces horlogers d’élite, certifiés selon des critères extrêmement stricts, possèdent une maîtrise parfaite des techniques de fabrication les plus complexes. Ils oeuvrent avec une précision et une minutie absolues, assemblant, ajustant et finissant chaque composant des montres MR-G dans un environnement immaculé. Leur savoir-faire s’illustre dans la création de pièces minuscules, comme les rotors d’une taille de 1.1mm seulement, dont la forme exige un usinage d’une extrême précision. Ils interviennent également dans le réglage des matrices électroniques complexes et des oscillateurs à quartz couplés au système Tough Solar, dans la finition impeccable des boîtiers puis celle des bracelets.

L’usine Yamagata Casio ne se contente pas de perpétuer les traditions horlogères ancestrales. Elle s’inscrit résolument dans l’ère de l’innovation en intégrant des technologies de pointe à ses processus de fabrication. Tout d’abord avec la la ligne de production modulaire, un système ingénieux permettant d’assembler des mouvements différents en combinant des pièces et des alimentateurs interchangeables. Des robots propriétaires assurent l’assemblage avec une précision et une efficacité redoutables. Ensuite, le système de détection d’anomalies doté de microphones omnidirectionnels Casio, est un système intelligent permettant d’identifier les moindres défaillances des machines avant qu’elles ne surviennent, garantissant ainsi une production irréprochable. Et finalement, les techniques de moulage ultra-précises qui, grâce à des procédés de pointe tels que la nano-impression et la découpe par électro-érosion fil (WEDM), permettent à l’usine de Yamagata de réaliser des composants d’une finesse et d’une complexité stupéfiantes, comme les cadrans et les index des MR-G.

Une robustesse typiquement japonaise

Certes, Grand Seiko et Credor illustrent au mieux l’industrie horlogère traditionnelle au pays du soleil levant. Il faut être rationnel, G-SHOCK ne coche pas la case principale des amateurs de mécanique. Mais l’on peut sentir les traditions uniques inhérentes à la culture japonaise, perfectionnées durant près d’un millier d’années, telles que la forge des casques et armures des samouraïs pensés pour offrir robustesse, durabilité et maniabilité tout en affichant des finitions d’une beauté royale. On pense notamment à la MRG-B2000SG inspirée d’un casque Kabuto qui matérialise parfaitement cet esprit.

À ceci s’ajoute, tel qu’évoqué plus haut, une structure inhabituelle de boîtier et hautement complexe. C’est ce que la maison Casio appelle « Multi-Guard », soit une construction unique formée d’un alliage d’acier et d’aluminium composée de pièces très spécifiques avec des tampons sophistiqués puis des suspensions aux 4 coins du boîtier permettant d’absorber les chocs externes. Cette composition permet d’ailleurs d’appliquer le polissage Sallaz, pièce par pièce, pour le peaufiner plus facilement à chaque facette de chaque composant.

Pour les MR-G à affichage analogique, G-SHOCK a du créer un autre type de structure spécifique. Appelée « Clad Guard », celle-ci s’intègre dans la couronne et les boutons-poussoirs avec des tampons greffés à même l’arbre de couronne, dispersant les vecteurs de force absorbés pour protéger les structures internes des chocs. Même chose pour les boutons grâce à la présence de tubes de protection qui ajoutent une fonction digne de G-SHOCK sans entâcher l’étanchéité de 200 mètres garantie par chaque montre de cette série.

L’art des couleurs et des matériaux

Tout comme une grande maison horlogère, G-SHOCK applique un soin particulier aux couleurs et matériaux qu’elle utilise. C’est aussi là que le parallèle avec la haute horlogerie helvétique se fait, propulsant les montres MR-G au statut d’objet de luxe, à commencer avec le Cobarion, un nom que ceux ayant lu notre revue sur la MRG-B5000R dont nous avons fait l’acquisition (car nous sommes véritablement fans de la marque). Cet alliage à la dureté hors-norme, développée au Japon par la société Eiwa Corporation, offre une résistance 4 fois supérieure au titane, puis confère aux montres un éclat blanc et durable comparable au platine allié à une résistance aux rayures. Profitons-en pour parler de titane, car G-SHOCK utilise du DAT55G, un alliage haute performance offrant la même légèreté que le titane grade 5 – le meilleur de sa catégorie – mais avec une dureté 3 fois supérieure ! Et c’est sans compter l’incontournable verre saphir qui coiffe chaque MR-G, avec des traitements antireflets sur les faces intérieures et extérieures, puis une dureté proche de celle du diamant (note de 9 sur l’échelle de Mohs).

Terminons avec les technologies utilisées pour produire des nuances colorimétriques dignes des traditions ancestrales japonaises. Tout le monde connaît le PVD, le traitement par dépôt physique en phase vapeur que la quasi-totalité des maisons horlogères utilisent. C’est bien certes, mais il y a mieux. Tout d’abord, le DLC, un revêtement en carbone de type diamant appliqué sous forme de gaz et uniquement pour la teinte noire des MR-G, offrant une résistance supérieure à l’abrasion au matériau sur lequel il est exécuté. Ensuite, G-SHOCK utilise l’AIP, une technique de traitement par placage ionique utilisant des décharges d’arc et transformant les matériaux métalliques en plasma pour ioniser les éléments, soit les transformant au niveau atomique en un clin d’oeil pour former un film plus adhérant et plus dur. Ces techniques ont permis la création de la teinte A-zumi, un bleu-noir utilisé dans la peinture japonaise Nihonga, mais aussi l’Akazonae, une teinte rouge évoquant l’armure foncée des samouraïs historiquement obtenue à base d’un minéral précieux nommé cinabre, et sans oublier la teinte Kachi-iro, un bleu indigo plus profond que le marine que les guerriers japonais considéraient comme couleur de la victoire.

Bref, du G-SHOCK tout craché qui renforce notre admiration pour cette marque pas comme les autres et qui nous permet de la réconcilier avec notre passion pour tout un pan de l’horlogerie. Cela mériterait presque un voyage au japon pour suivre les étapes de fabrication d’une MR-G et de comparer le tout avec ce que les suisses font de mieux. Si vous ne connaissiez pas cette gamme de la maison nippone, nous espérons que cet article provoquera une nouvel engouement, le même qui nous anime. Et pour en savoir plus, rien de tel que de découvrir les montres sur le site officiel de la marque.

Voir la collection sur le site officiel de G-SHOCK.