Les années 60 sont une période très riche pour la plongée, avec le développement de la plongée récréative, mais aussi des explorations sous-marines, notamment grâce au commandant Cousteau. Et inévitablement, cet essor est accompagné par l’amélioration continue des outils de plongée, aux rangs desquels l’horlogerie joue un rôle primordial. C’est dans ce contexte de pleine effervescence que naît Aquastar. Retour sur cette marque historique créée pour des plongeurs par des plongeurs.
Avant Aquastar, JeanRichard
Avant Aquastar, il y a JeanRichard SA. Une société horlogère suisse, qui, dès 1958, dépose un brevet pour une montre de plongée à lunette tournante, qui devient, deux ans plus tard, la JeanRichard Aquastar 60. Ainsi, les deux noms cohabitent pendant deux ans sur le même cadran. Puis en 1962, JeanRichard SA crée la sous-marque Aquastar Instruments SA, dédiée à la plongée, avec à sa tête Frédéric Robert, le fils du directeur de la maison-mère.
Frédéric Robert et Marc Jasinski, deux hommes de mer à la tête d’Aquastar
Pour comprendre l’esprit d’Aquastar, il faut s’intéresser à son fondateur : Frédéric Robert. Et surtout à ses passions : l’horlogerie bien sûr, mais aussi la plongée, la voile et la régate. Ses compétences sont telles qu’il participera ensuite à la conception des Seamaster d’Omega. À ses côtés, l’autre personnage central d’Aquastar se nomme Marc Jasinski. Ce belge né en 1933 est également à la croisée de l’horlogerie et du monde maritime. Passionné de plongée et d’exploration sous-marine, photographe émérite et pionnier de l’archéologie sub-aquatique, il dirige également le département de recherche et de développement d’Aquastar. Ainsi, avec à sa tête deux véritables hommes de mer, passionnés et experts dans leur domaine, Aquastar se construit véritablement comme une marque de plongeurs faite par des plongeurs. Et c’est sans doute l’une des raisons de son succès.
Un positionnement très particulier
Aquastar envisage dès le début ses montres comme de véritables instruments professionnels. Et suivant cette logique, elles ne sont vendues que dans des magasins d’équipements nautiques, comme la fameuse Spirotechnique de Cousteau. Elles sont donc absentes des boutiques d’horlogerie traditionnelles ou des grands réseaux de distribution. Ce positionnement très particulier permet également à la marque d’être au plus proche de ses clients, pour mieux répondre à leurs attentes.
L’Aquastar 60, le modèle fondateur
L’Aquastar 60, comme on l’a vu plus haut, portait d’abord le nom JeanRichard. Elle est produite entre 1958 et 1962, et s’inscrit dans l’essor de la plongée récréative, avec son profil de skin-diver. L’Aquastar est une montre assez classique : lunette externe rotative en acier, et boîtier acier étanche à 100 mètres (puis 200 mètres pour les derniers modèles signés Aquastar). L’Aquastar 60 est animée par le calibre automatique suisse Adolf Schild AS1701, muni d’un système antichoc Incabloc. Et déjà on retrouve ce qui fera le succès des modèles suivants : une construction robuste et fiable, une lisibilité exemplaire, sans oublier la fameuse clé à étoile gravée sur le fond de boîte, qui deviendra la signature de toutes les montres Aquastar.
L’Aquastar 63 et la lunette interne
Sortie au milieu des années 60, l’Aquastar 63 partage avec l’Aquastar 60 la même mécanique, le calibre AS1701, ainsi que l’étanchéité de 200 mètres. Mais elle s’en distingue par une innovation maison dûment brevetée : une lunette interne rotative. Cette configuration fait bien évidemment penser aux fameux boîtiers “Super-Compressor” développés par Erwin Piquerez EPSA. Ces derniers, conçus à la même période, se distinguent par une 2ème couronne à 4h, permettant l’action sur la lunette. Mais cette couronne additionnelle introduit une nouvelle faiblesse potentielle pour l’étanchéité, et Aquastar décide de procéder autrement. Sur l’Aquastar 63, la lunette interne est actionnée via la couronne principale à 3h, grâce à une roue dentée entraînée par la tige de remontoir. De plus, la rotation est unidirectionnelle, ce qui est essentiel pour une lecture sécurisée du temps de plongée.
La Deepstar, la montre iconique d’Aquastar
Dévoilée en 1966, la Deepstar est sans conteste la montre la plus connue d’Aquastar. Et dès le premier regard, on comprend vite pourquoi : la Deepstar est le mélange parfait de la fonctionnalité et du style. En effet, d’un côté ce chronographe de plongée cumule 5 fonctions : temps de plongée, cadence de remontée, temps de décompression, désaturation en azote et majoration de durée de palier de décompression en cas de plongées successives. La montre était d’ailleurs vendue avec ses propres tables de décompression. Un véritable ordinateur de plongée avant l’heure ! Par ailleurs, la Deepstar peut se targuer d’être le premier chronographe certifié fonctionnel en immersion jusqu’à 100 mètres. Et, d’un autre côté, la Deepstar ne néglige pas son esthétique. Son cadran si particulier – et si charmant – est indissociable de la personnalité de la montre. Sa disposition asymétrique, son énorme compteur 30min à 3h façon « big eye », ses index en forme de diapason et sa trotteuse losange (qui parfois était simplement remplacée par un index à 9h), sont autant d’éléments caractéristiques qui font le succès de la montre. De plus, la Deepstar adopte un boîtier fin typique des skin-diver, de 37.5mm de diamètre pour 13mm d’épaisseur, surmonté d’un verre plexiglas et cerclé d’une lunette acier. Celle-ci présente une double numérotation, nécessaire aux différentes fonctions de la montre. Enfin, côté mécanique, la première génération de Deepstar est animée par un mouvement à remontage manuel, le Valjoux 23 : un calibre chronographe à roue à colonne, qui reçoit pour l’occasion un système de protection des chocs Incabloc. Puis ce mouvement est remplacé par le Valjoux 92, à remontage manuel également.
Le commandant Cousteau et l’Aquastar Deepstar
La Deepstar est un véritable instrument de plongée destiné aux professionnels des fonds marins. Et le célèbre commandant Cousteau et son équipe de La Calypso, notamment le plongeur Raymond Colle, ne s’y trompent pas. Ils embarquent le chronographe dans leurs expéditions sous-marines, comme les Précontinent I, II et III, où sa lisibilité exceptionnelle et ses différentes fonctions feront la différence. Cette légitimité, associée au charme exquis de la montre, explique certainement l’engouement des collectionneurs autour de ce modèle, qui a d’ailleurs été fidèlement réédité en 2022.
L’Aquastar Regate
Le compte à rebours de régate est une autre innovation d’Aquastar. Il est affiché grâce à 5 guichets circulaires dans la partie supérieure du cadran, un par minute écoulée, qui passent du rouge au blanc au fur et à mesure que le départ de la régate approche. Un bouton poussoir situé à 4h permet d’actionner cette fonction, qui donne son nom à toute une collection de montres dans les années 60 et 70, sobrement baptisée Aquastar Regate. Rendue populaire par l’essor des sports nautiques, ces modèles façonnent l’image d’Aquastar pour les amateurs de voile au même titre que la Deepstar pour les plongeurs.
La Benthos 500
Sortie en 1970, la Benthos 500 est ce que l’on peut appeler une plongeuse “musclée”. Avec son boîtier monobloc de 42mm de diamètre pour 16mm d’épaisseur (dont 4mm pour le verre), c’est effectivement un monstre très imposant pour l’époque. Mais il y a une bonne raison à cela : la Benthos 500 affiche une étanchéité de 500 mètres, une véritable prouesse pour l’époque. Mais ce n’est pas tout : elle propose également un chronographe à mono-poussoir 60min avec retour-en-vol. Une fonction très appréciée des plongeurs, à tel point que le célèbre apnéiste français Jacques Mayol la portera lors de son record de plongée libre à 101m en 1976. La Benthos 500 connaît également une carrière militaire, aux poignets des plongeurs de l’US Navy, à partir de 1973.
Aquastar aujourd’hui
Depuis 2020, la marque Aquastar appartient au groupe Synchron. La production moderne d’Aquastar est composée de rééditions des modèles phares de la marque : Deepstar, Benthos 500 et Aquastar 60. En attendant peut-être de nouveaux modèles ?