Le tourbillon est sans doute la complication horlogère la plus prestigieuse. Il requiert un savoir-faire exceptionnel, que seules quelques rares maisons horlogères peuvent mettre en œuvre. Mais pour ceux qui trouveraient cela encore trop banal, il y a encore mieux : le gyrotourbillon.
Du tourbillon au gyrotourbillon
Le tourbillon, ou « cage tournante », est un mécanisme dont le principe a été imaginé par le génial horloger français Abraham-Louis Breguet à la fin du XVIIIème siècle. Le but est de compenser les effets néfastes de la gravité sur la précision des mouvements horlogers. En effet, l’orientation de la montre joue sur l’isochronisme du mouvement. La solution est donc de créer un mécanisme capable de faire prendre à l’ensemble échappement-balancier toutes les positions possibles. Pour plus de détails, consultez notre article sur le fonctionnement du tourbillon.
On peut distinguer plusieurs variantes du tourbillon. Le Carroussel, inventé en 1892 par Bahne Bonniksen, ou bien le tourbillon volant, créé par Alfred Helwig en 1920. Mais la plus grande avancée est sans aucun doute le gyrotourbillon. Le principe de base est relativement simple : tandis qu’un tourbillon classique tourne autour d’un seul axe et propose toutes les positions verticales possibles, le gyrotourbillon tourne autour de plusieurs axes. Il mêle les rotations autour des différents axes afin de passer par l’ensemble des positions possibles. Ainsi, il parvient à s’affranchir totalement des effets de la gravité, en les compensant dans toutes les directions possibles.
Eric Coudray : le concepteur du gyrotourbillon
Comment parler du gyrotourbillon, sans parler de son concepteur : Eric Coudray ? Né en France en 1965, il étudie d’abord au lycée professionnel de Besançon, avant de poursuivre sa formation en Suisse, à La Chaux-de-Fonds. Il se spécialise très vite dans les mécanismes les plus complexes, faisant preuve d’une maîtrise exceptionnelle. Dès 2004, il créée le gyrotourbillon pour le compte de Jaeger-LeCoultre. Puis au sein de TEC Ebauches, il continue de développer son concept, qu’il renomme « sphérion« , pour la contraction de « sphère » et de « tourbillon » (le nom « Gyrotourbillon » étant propre à Jaeger-LeCoultre). Par la suite, il travaille en collaboration avec d’autres marques, comme Purnell et MB&F.
L’apanage des plus grands
Jaeger-LeCoultre est incontestablement le maître des gyrotourbillons. Pas moins de trois modèles sont présents au catalogue de la Grande Maison : la Master Gyrotourbillon (2004), la Reverso Gyrotourbillon (2008) et la Master Grande Tradition Gyrotourbillon 3 Jubilee (2013). Franck Muller est également un précurseur dans le domaine et propose la Révolution 3 dès 2004. Purnell innove en présentant une montre équipée d’un double sphérion, la Escape II. Parallèlement, MB&F propose sa propre vision du sphérion, avec la Legacy Machine Thunderdome, et son cadran incliné, protégé sous un dôme de verre. Enfin, Zenith développe une déclinaison intéressante, avec la Christophe Colomb. Ici, la cage gyroscopique compense les mouvements de la montre, pour que l’organe régulateur soit toujours à plat. Une autre façon d’appréhender le problème de la gravité, pour un résultat tout aussi envoutant.
La quintessence du mouvement horloger
D’un point de vue purement pragmatique, l’utilité d’un gyrotourbillon est discutable. Car, même s’il augmente la précision du mouvement, pour atteindre +/- 1sec par jour, la débauche de moyens est tout bonnement colossale. Mais finalement, ce genre de considération bassement matérielle n’a pas sa place lorsque l’on voit le mécanisme en mouvement. Car c’est ainsi que s’apprécie réellement un gyrotourbillon : en mouvement. Absolument hypnotisant. Il nous rappelle plus que jamais que nos chers garde-temps sont des mécanismes dynamiques. Par sa beauté fascinante, son extrême rareté, et l’excellence qu’il requière, le gyrotourbillon représente sans doute l’un des plus grands aboutissements de la mécanique horlogère.